Restaurant Martin Berasategui – Donostia – 2011

- 2011 :  Comme beaucoup de mes amis, c’est l’année de nos 30 ans. On va se faire un gros plaisir : Un resto étoilé – Et pas n’importe lequel…Martin Berasategui à San Sebastian (3 étoiles)

- Un an plus tôt :  On est en pleine recherche de la table de nos rêves. La grande cuisine Française est hors de prix et le classement San Pellegrino 2010 ne lui donne pas raison. Son classement est peut être subjectif mais il montre le déclin de la cuisine française dans l’imaginaire des grands chefs du monde entier… En revanche, il fait apparaitre une cuisine espagnole des plus créative avec 4 tables dans le top 10. Deux de ces tables se trouvent à San Sebastian, juste après la frontière.

Banco ! Nous allons en profiter pour découvrir l’hospitalité des Espagnols, les bons vins, les tapas, le soleil et les tarifs attractifs…durant 5 jours (faut ce qu’il faut !)

Pour notre première table étoilée, nous hésitons entre le Mugaritz et Martin Berasategui. Et sur les conseils de Laurent V du site Gastros On Tour (GOT), nous optons pour Martin Berasategui. Mugaritz étant pour lui une cuisine plus expérimentale, intellectuelle qui risque de nous décevoir.

- 1er juin 2011, 14 h: Après 4h de route interminables, nous arrivons sur le parking du restaurant. Il n’y a pas âme qui vive – Bizarre ! La bâtisse est imposante de l’extérieur, mais située en plein milieu du zone résidentielle sans aucun charme…

Nous sommes attendus, l’accueil et cordial et chaleureux. Notre table est prête. Le long des grandes baies vitrées. La décoration est simple et moderne. Tons clairs et bois foncés. Les tables sont espacées pour maintenir l’intimité.

Et justement, seul problème, il n’y a absolument personne dans le restaurant. A part le personnel et donc les dizaines d’yeux qui nous scrutent… Un léger malaise s’installe ! Il fait beau et notre maître d’hôtel nous propose de déjeuner dehors. On saute sur l’occasion car l’ambiance est trop étouffante

Nous faisons connaissance en Français avec l’équipe de salle : jeune, attentionnée et discrète – Bienvenue dans l’ambiance 3 étoiles. Martin Berasategui n’est malheureusement pas présent aujourd’hui.

Une belle coupe de champagne Laurent Perrier nous met tout de suite en appétit.

Nous avions choisi par avance le grand menu dégustation à 240 € avec les vins compris. En amateurs esthètes que nous sommes, nous avions définis par email, une première sélection de vins espagnols « découvertes » . En précisant que cette liste serait modifiée sur place en fonction de la carte des vins…

On nous apporte nos cartes, réalisées sur mesure car nous avions éliminé un plat pour certains; Suivie de près par la première mise en bouche « séductrice et légère » :

  • 2010 – Saumon Keia légèrement fumé, avec algues, poudre de noisette, café et vanille

Saumon Keita legerement fume avec algues - poudre de noisette - cafe et vanille

On entre immédiatement dans le vif du sujet : Ce plat est fin, subtil et précis. Quelques arômes seulement, mais bien marqué. Excellent. Légèrement gâché par le vin. Car justement, nous attendons toujours le sommelier qui se fait attendre. Nous aurions aimé choisir d’autres vins que ceux proposés. Avoir la possibilité de découvrir d’autres saveurs que les vins d’Espagne. Nous appelons le maître d’hôtel et je pense qu’à ce moment là, nous ne nous comprenons pas. Il certifie que les vins espagnols sont excellents et il pense que nous remettons en cause cela.

  • 1995 – Mille Feuille caramélisé d’anguille fumée, foie gras, petits oignons et pomme verte

Mille-feuille anguille et foie gras - pomme verte

Ce plat est absolument savoureux, tout en douceur, ça fond en bouche. Le foie gras est excellent, l’anguille est moins marquée pour moi. Toujours pas de vin…ni de sommelier !

J’explique au maître d’hôtel que nous ne voulions offenser personne, et que les vins espagnols seront parfaits (ils le seront…). Il retrouve le sourire, et le sommelier sort de son antre avec un premier vin blanc et deux magnifiques verres par personne. Car je ne sais pas si ce quiproquo nous a été favorables, mais nous allons être gâtés avec les vins (quantité et qualité)

  • 2011 – Huitre avec concombre, fruit acide, kaffir et coco / Valdesil 2009 – 100 % Godello – D.O. Valderras

Huitre avec concombre - kaffir et coco

Chipirons farcis a encre de seiche

C’est le plat que mes compatriotes n’ont pas voulu essayer. Ils ont bien eu tort ! Pour moi un de meilleurs plats de ce menu. Les arômes sont trés marqués, surtout l’huitre qui est excellente. Mais l’association entre la douceur du lait de coco et l’acidité du Kaffir (ou combawa) est remarquable. Le vin a une forte acidité sur les fruits jaunes (pêche) et est très vif. Grande fraicheur et finesse.

  • 2009 – Perles de fenouil en cru, en risotto et en émulsion / Monteabellon 2009 – 100% Verdejo – D.O. Rueda

Martin Berasategui - perles de fenouil en cru - risotto - emulsion

On maintient le cap avec ce plat parfaitement maitrisé. Les associations cru / risotto / émulsion, se complètent à merveille. Le vin, d’un cépage rare aux dires du sommelier est cultivé aux abords de Valladolid. Il est plus riche et gourmand que le premier. On maintient les mêmes arômes avec une note oxydative plus marquée mais toujours beaucoup de finesse et de longueur. ça monte crescendo…

  • 2011 – Oeuf « Gorrotxategui » sur salade liquide de tubercules rouges et carpaccio de fanon de porc / Abel Mendoza 2009 – 100% viura – D.O. Rioja

Martin Berasategui - Oeuf gorrotxategui - salade liquide tubercules rouges - carpaccio fanon de porc

C’est le plat qui m’a laissé le plus circonspect. L’oeuf, qui vient d’une ferme à côté, est mollet. Les arômes de la betterave sont un peu trop marqués alors que je ne retrouve pas ceux du porc. Le vin par contre est encore d’un niveau supérieur. Tout en finesse, sur des arômes de fruits jaunes, d’ananas et d’agrumes. Avec en plus un gras bien marqué. les vins se boivent tous seuls, mais les quantités servies sont astronomiques et on se sent déjà enivrés par l’alcool. Nous passons peut être trop de temps sur la dégustation des vins. Au détriment de ce qu’il y a dans notre assiette.

  • Salade tiède de coeurs de légumes avec crustacés, crème de laitue de ferme et jus iodé / Trio 2009 – Garnacha et Viuja – D.O. Priorat

Martin Berasategui - Salade tiede coeur de legumes avec crustaces - creme de laitue - carpaccio de fanon de porc

De nouveau, un des grands plats de ce menu. Visuellement, c’est magnifique, beaucoup de couleurs, de matières. Les parfums sont très bien ciselés et les produits de grande qualité et de fraicheur. Les légumes sont posés sur une gelée de tomates avec un parfum iodé. Les matières sont fondantes, croquantes, douces, acides, sucrées, épicées, c’est l’explosion en bouche. Quel délice ! Quand au vin, je trouve que l’on perd un peu en finesse. Au profit d’un bois plus marqué et des notes oxydatives.

  • Caillé d’algues avec un consommé translucide de carabinier / Vallegarcia 2008 – 100% Viognier – V.T. Castilla

Martin Berasategui - Caille algues - consomme translucide de carabinier

Le plat est présenté dans une coupelle, des beaux morceaux de carabinier (grosse crevette d’un rouge intense) sont plongés dans un caillé vert. Le maitre d’hôtel sert ensuite le consommé pour que tout se mélange. Visuellement, ce n’est pas très beau une fois que le liquide est versé. Mais gustativement,  c’est impressionnant de saveur. Le vin est quand à lui exceptionnel. D’une richesse, d’une puissance et d’une longueur impressionnante. Le vin du repas, sans aucun doute.

  • Rouget roti et ses écailles comestibles. Jus de chocolat blanc avec algues / Juan Gil 2008 – 100 % Monastrell – D.O. Jumilla
Martin Berasategui - Rouget roti - ecailles comestibles - jus de chocolat blanc

 

Pour moi, le plat qui sort du lot dans ce menu. Avec l’association des queues de cochons grillées. Les saveurs sont exemplaires, la cuisson est parfaitement maitrisée, les accords entre le croquant des écailles et le fondant du poisson. La douceur du jus de chocolat blanc associée au salé des écailles. Tout est parfait. Un vrai goût de « pas assez ». Le vin est étonnant, tout en légéreté, sur des arômes de fruits frais (cassis, myrtille), il n’y pas du tout de bois, c’est voluptueux et gourmand à la fois. Une belle réussite, mais pas partagés avec tous mes compatriotes.

  • Pigeon d’Araiz rôti avec pâtes fraiches aux champignons et petits oignons, touche de crème truffée / Coto de Hayas reserva 2005 – 100 % Garnacha – D.O. Campo de Borja

On touche de nouveau le sublime, avec ce filet de pigeon. C’est le coeur de la viande qu’on peut trancher à la fourchette. L’accompagnement est plus difficile à cerner et on ne voit pas bien les pâtes aux champignons. En revanche, une légère crème truffée est parfaite. Le vin est plus classique, un boisé bien maitrisé, des fruits mûrs (pruneau) une belle longueur. Mais je suis moins fan

  • 2010 – Crème glacée avec granité de rhum, laminé de carotte, compote de betterave / Casta Diva – 100% Moscatel – D.O. Alicante

Pour moi, le meilleur dessert. Tout en fraicheur, le granité de rhum est délicieux, la carotte et la betterave sont des arômes surprenants mais qui s’adaptent parfaitement à un dessert hors norme. Le vin est délicieux, très sucré mais malgré tout avec beaucoup de fraicheur et d’acidité en fin de bouche.

  • 2010 – Chocolat et miel d’acacia avec café amer irlandais / Pedro Ximenez 100% – D.O. Jerez

Martin Berasategui - Chocolat et miel acacia - cafe amer irlandais

Le plat que je me souviens le mois. une glace au café amer irlandais, un très beau dessert tout en longueur. Le Xerez est d’une couleur peu attirante, un mélange de marron et noir, un peu comme du petrole, avec des arômes oxydatifs forts et de miel, de chocolat, de café et d’orange amer. Une bouche sirupeuse, à la limite de l’overdose. Mais ce vin va très bien avec le dessert.

Après 4 heures à table, on finit par quelques petites mignardises pendant que le personnel se retire discrètement pour nous laisser apprécier cette fin de repas tranquillement.

  • Conclusion : C’était pour moi, mon premier restaurant étoilé. Et j’ai du mal à imaginer que certains restaurants puissent se classer au dessus de Martin Berasategui. Ca vraiment été un moment magique. Le personnel est aux petits soins (on tire la chaise, la serviette est repliée dès que l’on s’absente de la table, les plats sont servis en même temps à tous les convives…) toutes ces petites attentions qui font les 3 étoiles. Toute la brigade nous étant quasiment dévolue !
  • La cuisine est extraordinaire (même sans le chef…), les produits sont frais et bien choisies, toutes les cuissons sont maitrisées. Certains plats plaisent moins que d’autres mais ne laissent jamais indifférents. Les portions sont parfaites pour apprécier chaque plat sans surcharge, ni impression de sortir de table avec la faim au ventre.
  • Les vins sont magiques, nous avons été gatés. Même si le retour à notre hôtel n’a pas été tâche facile (environ 2 bouteilles de grands vins dégustées par personnes)

Je pense que je peux conseiller ce restaurant à tous les amateurs épicuriens et esthètes que vous êtes. Foncez-y, c‘est extraordinaire !!

8 réflexions au sujet de « Restaurant Martin Berasategui – Donostia – 2011 »

  1. 14 octobre 2011 à 11:30

    pour moi le meilleur et le plus original de San Sebastian; pour les vins, je n’ai pas été très emballé, correct sans plus à ce niveau. Akelarre est meilleur sur les vins je trouve mais la cuisine nettement en dessous à mon sens.

    1. 14 octobre 2011 à 11:59

      J’avoue que pour mon premier grand restaurant étoilé, je suis resté sur le c.. Quelle claque ! Une cuisine vivante d’une grande créativité. Les vins étaient simples mais en accord avec les plats. Cela nous a permis de découvrir les vins d’Espagne autrement. La quantité a peut être été privilégiée à la qualité… A voir dans d’autres grandes tables espagnoles, mais en France, je ne connais aucune équivalence rapport qualité/prix